Au XIX siècle, Mesland, de laboureurs à sabotiers
Les Ledru ont donc quitté la profession de laboureur pour celle de sabotier, et ceci de père en fils à partir de la révolution. Pour quelles raisons cela s’est il passé ?
D’une manière générale, le sabotier travaillait dans les régions où il y avait des forêts et des bois ; C’est dire que, de tous temps, on a trouvé des sabotiers dans pratiquement toutes les régions de France. La difficulté de transport du bois obligeait souvent le sabotier à s’installer aux abords de ces forêts, souvent avec toute sa famille, dans une hutte qu’il construisait sur place.
Fabriquer un sabot n’était pas une tâche aisée et l’apprentissage était long. L’apprenti « creuse » et « finit » pendant quatre ou cinq mois, ensuite il taille pendant deux ans. Les apprentis étaient souvent fils de sabotier. Le père transmettait son métier à ses enfants et l’artisanat du bois se transmettait sur plusieurs générations.
La matière première, le bois, a attiré aux abords des forêts ces artisans besogneux. On achetait le bois sur pied dans la forêt de Bercé, bouleau, hêtre, peuplier et on choisissait des troncs bien droits. Comme l’abattage et le charriage étaient à leurs frais, on retrouve presque tous les sabotiers dans les hameaux proches de la forêt. Le bois entreposé à côté de la maison était scié au fur et à mesure de la demande. Il faut trois étapes pour fabriquer un sabot : la taille, la creuse, la finition. Lors de la taille, les quartiers sont alors assemblés par paire selon leur grosseur, hauteur et longueur. L’herminette leur donne une meilleure forme et le paroir finit de dégrossir. La creuse est l’opération qui consiste à « vider » l’intérieur du sabot avec des cuillères de diverses dimensions ; elle donne la forme du pied. La semelle est nettoyée avec la rouannette, et le boutiron achève l’opération. La finition ou « pare » s’effectue quand les sabots sont bien secs. A l’aide d’un racloir on fait disparaître les coups de paroir pour obtenir une surface bien lisse. On passe parfois les sabots à la cheminée ; accrochés à un mètre du foyer, la combustion de morceaux de cuir dégage une fumée brune qui les colore. Les sabots de bois blanc résistaient moins longtemps (un mois et demi) que ceux de bois dur (trois à quatre mois). Généralement, dès que les chaumes piquaient les pieds, on pensait aux sabots qui se vendaient le plus en octobre et en novembre.
Au cours du XIXe siècle, trois nouveaux métiers seront « compagnonnisés » : ceux de cordonnier (1808, après une éclipse de plus d’un siècle), de sabotier (1809), de boulanger (1811) Mais ils s’éteindront progressivement jusque dans les années 1950.
Comme nous le verrons en dessous, les mariages se faisaient entre eux. Et le savoir et les outils se transmettaient de père en fils…
Au XIXème siècle, l’usage du sabot se généralisant, chaque village eut besoin de son propre sabotier et c’est certainement pour cette raison que Frédéric Alexandre Ledru, père d’Adolphe Just s’installa en 1824 dans le village de Mesland avec son père René François Ledru. Sa famille est recensée au bourg lors du recensement de 1836.
Le village de Mesland est plus développé que celui de Villechauve (Gabriel y est d’ailleurs resté en tant que sabotier) ou celui deVilleporcher. Marie Anne comme vu plus haut y trouvera son époux.
Le village de Mesland est situé à égale distance entre Tours et Blois, centre historique des rois de France très proche de la ville d’Amboise (Indre et Loire).
Cette commune est fondée par les moines de l’abbaye de Marmoutier. Le défrichage de la forêt de Blémars au XIe siècle, par les hommes du prieuré, marque le début de l’histoire de Mesland et de plusieurs communes alentour.
La commune de Mesland présente un aspect très vallonné, très différent de la campagne d’Authon, favorisant la naissance de coteaux sur lesquels les vignobles de l’AOC Touraine – Mesland sont exploités ; Nous verrons que quelques branches alliées aux Ledru étaient vignerons à cette époque.
Mais revenons à notre histoire de famille.
René François, fils de François 2, né le 11/08/1777 à Villechauve s’est marié deux fois.
Le 11 juin 1805, avec Jeanne Hélène Bourgoin, fille de Pierre Bourgoin et Catherine Mesnard Ces deux parents sont décédés. Les 7 enfants Ledru/Guibourg sont à peine majeurs aux décès de leurs deux parents. Ce qui expliquerait la chute de la position sociale de cette branche de la famille. De plus Pierre Bourgoin est journalier. Nous connaissons peu de choses sur cette famille que l’on ne retrouve guère sur les registres d’états civils. Catherine Mesnard, décédée depuis l’an II (2/9/1794) a du épouser un estranger comme on dit !!! Donc Jeanne n’a plus sa mère depuis 11 ans déjà. Et Jeanne travaille comme couturière.
Qu’importe, de cette union naissent 4 enfants.
René François, le 2 sept 1806, puis Alexandre Frédéric le 20/09/1808, qui deviendra le père de Just, et enfin des jumeaux Pierre Eugène et Hélène Rosalie le 10 juillet 1811. Jeanne Hélène Bourgoin décède en 1845 à Mesland.
(Bourgoin est un nom de famille, représente un nom ethnique désignant la personne originaire de la bourgogne.)
René François se remarie en 1848 à l’âge de 71 ans avec Catherine Bigot, fille de Jean Bigot et Marguerite Lelu. Elle a 45 ans. Elle décédera quelques mois après (22/3/1849) à Mesland., peut être du choléra qui sévit en Touraine cette année-là comme il a sévi en 1832 et sévira encore en 1854 et 1884.
Sur les archives certaines se font appeler ‘’dame’’ Bigot.
Bigot – Terme d’injure au XIIe siècle. Le sens péjoratif (dévot) actuel ne date que du XVe siècle. Ordinairement : bî God, par Dieu (anglais ancien). La famille Bigot ou Bigod est issue d’un modeste chevalier du duché de Normandie, qui grâce à la conquête normande de l’Angleterre s’éleva très haut dans le baronnage anglo-normand, et devint l’une des plus riches familles du Royaume d’Angleterre. Plusieurs de ses membres ont porté le titre de comte de Norfolk de 1141 à 1306.
Par coïncidence on retrouve des Le Dru aussi dans le comté de Norfolk dans les années 1500, ce qui prouverait qu’une branche a suivi aussi les Plantagenets. D’Angleterre, des descendants de cette branche ont ensuite émigré aux USA.
Autre Bigot célèbre fut l’intendant du Canada, mêlé à l’affaire Péan.
Autre personnage célèbre de cette famille Alexandre Bigot, né le 5 novembre 1862 à Mer (Loir et Cher) et mort le 27 avril 1927 à Paris, est un céramiste français spécialiste des céramiques architecturales. Après un bref passage dans l’atelier de Paul Beyer (1873-1945) en Suisse, il installa son premier four en 1889 à Mer. Il débuta avec un atout majeur en poche : un diplôme de chimie, qui lui apporta une connaissance fort sollicitée, notamment par Jean Carries, qui à son tour l’influença plus tard. Pour le côté pratique (tournage et moulage), il bénéficia des conseils de Raphaël Tessier (1860-1937). Il a collaboré avec de nombreux architectes :André Arfvidson, immeuble ateliers d’artistes au 31bis rue Campagne-Première et au 25 Passage d’Enfer, à proximité de la Rue Delambre où, comme nous le verrons, s’installa à Paris Just Adolphe, le petit fils de René. Alexandre Bigot collabora aussi avec Bourdelle (On retrouvera cette rue d’Enfer dans le livre de Balzac cité plus bas).
A Mesland, lors du recensement de 1836, on trouve au bourg les familles suivantes :
René Ledru qui a 59 ans, vit avec sa femme Jeanne Hélène, et son dernier fils Pierre Eugène qui est encore célibataire.
Eugène Pierre Drue (Le) (1811/1874) épousera le 22/8/1839 Rosalie Broquet, originaire de la commune voisine de Monteaux. C’est la fille de Médard Broquet et d’Anne Paisse. Ils passeront les premières années de leur mariage à Mesland et ensuite Eugène s’installera comme sabotier à Monteaux où réside déjà la famille de sa femme. (ils y seront recensés en 1856 avec Désiré et Eugénie). Il y retrouvera les sœurs de sa femme Véronique Broquet Crepon et Julie Broquet Dumay et le frère de sa femme Jean Médard Broquet (21/2/1813).
Le couple aura quatre enfants, Eugène Theodore en 1842 mais décédera 9 mois plus tard, des jumeaux Désiré Prosper Dru et Françoise Eugénie Ledru nés le 26/06/1843 et Prosper le 25/06/1846 ?
Désiré qui sera aussi sabotier épousera à Maria Neau, d’où une fille Marie Henriette née à Monteaux le 1 oct 1876 qui épousa en 1896 à l’âge de 20 ans Auguste Voyer né à Onzain en 1871, vigneron et fils de vignerons (Jean Louis Voyer et Constance Frissant).
Le couple eut une fille Suzanne Voyer qui épousa x Quantin dont Jacques et Françoise Quantin qui habitent la région parisienne. Marie Henriette décédera à Monteaux le 7 mars 1957.
Quant à Françoise Eugénie, la jumelle de Désiré, elle se marie à Monteaux le 12/1/1864 à l’âge de 20 ans avec Antoine Quillon 28 ans.. C’est une famille nombreuse de vignerons. Le père s’appelle Antoine Quillon et la mère Augustine Le Veux. Elle est décédée lors du mariage d’Antoine.
Antoine a deux frères Claude qui, lors du mariage est âgé de 26 ans et Alexandre de 22 ans tous vignerons mais Alexandre est installé à Châtous dans la Marne. Les Quillon auront une fille Véronique le 17/5/1866 à Monteaux.
Quant à Rosalie Broquet Ledru elle décédera à Monteaux le 9/9/1888.
Dans la maison d’à coté, habitent Alexandre Frédéric, qui a 28 ans, avec sa femme Louise (Touzard) (elle a donc 27 ans) et les deux enfants qu’ils ont eus, Louise Eugénie qui a 2 ans et Sophie Pélagie âgée de 1 an. Alexandre exerce la profession de sabotier tout comme son père tandis que sa femme est couturière.
Le Village de Mesland : le bourg autour de l’Eglise. Dans quelles maisons vivaient-ils ? Peut-être dans l’une d’elles.
Dans une autre maison du bourg, vit Hélène Rosalie (Rose) la sœur jumelle de Pierre Eugene et petite sœur d’Alexandre ; elle a épousé Jean Etienne Chéreau. Hélène a 25 ans, son mari 27. Elle est ménagère, lui maçon ou tailleur de pierre. Ils ont un fils Jean Antoine Chéreau âgé d’un an. Les tailleurs de pierre ne manquent pas de travail.
La famille Chéreau est très ancienne et s’est répandue dans les régions de Touraine, du Vendômois et du Blésois et les premiers personnages connus remontent au 13eme siècle.
Toujours au bourg et proche des autres familles vit la famille Touzard. Ce sont des vignerons, certainement importants car ils savent signer depuis longtemps, tout comme les Chéreau.
La famille Touzard est composée du fils Jean, 38 ans, de sa femme Rose Rigoreau. Avec leurs quatre enfants, Jean âgé de 8 ans, Louis (4 ans) Rose Angélique (3ans) et Julie Geneviève (1 an).
Jean Georges Touzard, âgé de 81 ans, veuf de Marguerite Raineau, vit chez son fils.
Alexandre Fréderic a donc épousé Louise, la sœur de Jean. Celui qui a 38 ans. Les Ledru, Chéreau et Touzard sont donc beaux-frères et belles-sœurs. Et les enfants cousins germains. On imagine les enfants aller et venir d’une maison à l’autre comme vous le faites vous mêmes 200 ans plus tard.
Chez les Touzar(d) orthographié sans ‘’d’’ sur les registres d’Etats Civils mais avec un ‘’d’’ lors du recensement de 1836, on note les naissances successives d’enfants de Jean Touzar, vigneron et Marguerite Raineau sa femme :
- Jean Georges (1798/1840) qui épouse Rose Rigoreau
- Françoise 8 thermidor an 9 qui décède 1 mois après
- Marguerite 7 brumaire an 11
- Julienne décédée à l’âge de 8 ans le 27 plumôse an 11
- Marie Madeleine née le 5 pluviôse an 12 décédée 8 mois après
- Anne décédée à l’âge de 28 mois le 11 ventôse an 13
- Magdelaine née le 11 vendémiaire an 14 décède quelques mois après
- Nicolas né le 13/2/1807 décédé le 21 aout 1807
- Catherine née le 28 /9/1808 décède le 12/10/1808 à 14 jours
- Et enfin Jeanne Louise notre aïeule qui nait le 2/12/1809, qui épousera Frédéric Alexandre et donnera naissance à Just. Elle décédera à l’âge avancée de 84 ans.
(touzard représente la forme péjorative de touze, patronyme issu de l’ancien français touse qui signifie chauve, tondu, rase : sobriquet qui s’est applique aussi bien a un jeune homme imberbe qu’a une personne a la tête rasée, ou aux cheveux coupes courts)
En 1836, on dénombre à Mesland 611 habitants, 313 de sexe masculin, 298 de sexe féminin.
Lors du recensement de 1841, peu de changement.
Les Alexandre Ledru ont toujours deux filles, idem pour les Chéreau.
René et Jeanne Hélène se retrouvent seuls, Pierre Eugène s’est installé avec sa femme Rosalie Broquet dans une autre maison du bourg. Mais ensuite le couple partira s’installer à Monteaux.
Rose Anne Rigoreau Touzard a perdu son mari l’année précédente ainsi qu’une de ses filles Julie Geneviève.
Par contre Marie Anne Ledru, la fille de François qui a épousé en 1836 Pierre Lefert s’est installée au bourg avec ses deux beaux fils Pierre et Hyppolite.
(Pour mémoire, le châtelain de Mesland est un dénommé Chaput époux de Marie Abraham, Louis Charles Ledru que l’on retrouve en Auvergne a aussi épousé une Abraham). Les Chaput sont nombreux et ont été maire de Mesland. Une Marie Louise Touzard y travaille comme domestique.
Lors du recensement suivant en 1846, le curé est mentionné. Son nom est Julien Bottier. Il a 36 ans. Il vit avec son père, sa mère née Rétif et sa sœur Adélaïde. I y rejoint ses parents qui sont déjà là en 1836. Combien de temps reste t il dans la paroisse de Mesland ? Est-ce lui qui a découvert les qualités intellectuelles chez Just qui naitra deux ans plus tard ?.
Frédéric Ledru et sa femme Louise habitent toujours avec leurs deux filles Eugénie et Pélagie qui ont respectivement 12 et 10 ans. Ils habitent toujours dans le bourg près de l’église.René Ledru habite seul. Sa femme Hélène Jeanne s’est éteinte l’année précédente en 1845. Il a 68 ans.
Toujours au Bourg pas de changement pour Rose Anne Rigoreau veuve Touzard qui vit seule avec ses 3 enfants adolescents.
Par contre Etienne Chéreau et sa femme Madeleine, née Boffé, viennent d’emménager près de leur fils Jean Etienne et leur belle fille Rosalie (Rose) Ledru. Ils sont avec une fille Eugénie Chéreau âgée de 22 ans. Elle est couturière.
Jean Etienne Chéreau et Rosalie ont eu un fils Jean Antoine né le 16/1/1835 à Bougay. Il a 11 ans maintenant. Ce garçon qui deviendra marchand d’étoffes, se mariera deux fois, la première avec Joséphine Catherine Loiseau qui mourra assez jeune. Il épousera en 2nde noces, le 5/6/1871, Marie Louise Denis, une jeune rentière de 29 ans née à Monteaux, fille d’Etienne Denis et Louise Philippon, marchands de bois.
Jean Etienne et Rosalie ont eu l’année dernière un second fils Georges né en 1845.
Chez les Lefert, Pierre a 33 ans, (il est né en 1813 à Morand (I&l). Il vient d’épouser Marie Bellanger (26 ans). Ils sont installés à Grosbois. Les parents Lefert agés de 69 et 62 ans vivent avec leur fils Hyppolite (29ans) à la ferme de la Beaucerie.
Lors du recensement suivant, en 1851, la famille Chéreau s’est agrandie avec l’arrivée d’une petite fille Pélagie Félicité née le 9 juin 1849 à Mesland.
Il y aura encore une petite Estelle en 1854.
Par contre Rose Angélique Touzard, la fille de Rose Rigoreau a du mourir car son nom n’est plus indiqué. Elle aurait eu 15 ans.
A la Boucherie, les Lefert Pierre et Marie Anne Ledru vieillissent Ils ont 72 et 67 ans.
Marie Anne sera veuve à 72 ans lors du recensement suivant (1856) et son fils Hyppolite (35ans) se mariera avec Louise Gouffault. (26ans). Sa profession est Fagoteur tout comme le sont les Proust.
Le Fagoteur est celui qui met en fagot le bois qui sera utilisé lors du séchage des briques. De grandes quantités sont nécessaires.
Au hameau de Gros-bois vivent toujours Pierre et Marie Lefert avec leurs 3 enfants : Pierre, Marie et Augustine (9,7 et 5 ans)
La surprise vient du fait qu’Alexandre Frédéric Ledru n’est plus recensé, ni lui ni son fils Adolphe Just. Seules le sont Louise et ses deux filles qui ont respectivement 17 et 15 ans. Elles ont quitté le bourg et se sont installées aux Quesennes ?? Les jumeaux nés en 1848 auraient eu 3 ans. Louise avait destiné ses deux fils l’un à la prêtrise, l’autre à la médecine. Mais seul Just vécut. Etrange que Just ne soit pas recensé ! Où et avec qui vit il ? Est-il chez une nourrice ? Nul ne le sait !
Concernant Alexandre Fréderic, on sait qu’il a quitté sa famille peu après la naissance des jumeaux. A-t-il profité de l’ouverture, en 1849, de la ligne Tours Paris qui passe par Onzain la commune voisine pour découvrir le monde ou bien a-t-il rejoint les émeutiers parisiens ? La Révolution de 1848 qui est la deuxième révolution du 19e siècle, après celle de juillet 1830, se déroule à Paris du 22 au 25 février 1848. Sous l’impulsion des libéraux et des républicains, le peuple de Paris, à la suite d’une fusillade, se soulève à nouveau et parvient à prendre le contrôle de la capitale. Le roi Louis-Philippe, refusant de faire tirer sur les Parisiens, est donc contraint d’abdiquer en faveur de son petit-fils, Philippe d’Orléans. La 2nde République est proclamée par Alphonse de Lamartine, entouré des révolutionnaires parisiens. Un gouvernement provisoire est mis en place, mettant ainsi fin à la Monarchie de Juillet. Pendant toute cette période troublée, en ces temps d’épidémie, de choléra qui tue énormément, de disette, de crise financière, de rivalités politiques ou de querelle à propos des écoles religieuses, les incidents se produisent de plus en plus régulièrement dans la capitale et peuvent faire resurgir les barricades.
La Révolution de 1848 (L’Illustration)
Alexandre Frédéric s’est-il opposé au coup d’Etat de Louis Napoléon Bonaparte de 1851 ? Il a 43 ans. A t’il été arrêté ? Beaucoup de manifestants comme le père de Clemenceau, ont été arrêtés et libérés en 1858. Comme Frédéric ne se manifeste qu’en 1861 pour autoriser sa fille Pélagie à se marier, tout est possible.
On ne sait rien des convictions politiques d’Alexandre Frédéric. Il serait intéressant d’approfondir le sujet. Néanmoins son nom n’apparaît pas parmi les déportés de cette période. 19 transportés sont natifs du Centre et des pays de Loire dont un Touchard. Un Ledru est déporté à l’Ile des Pins en Nelle Calédonie mais rien à voir avec le notre.
Il serait toutefois surprenant qu’il ait emmené son fils avec lui ? Mystère.
Car on retrouve Adolphe Just lors du recensement de 1856 avec sa mère et sa sœur Sophie Pélagie. Il a 8 ans. Sa sœur 21 ans. Sophie Pélagie, comme nous le verrons plus bas, n’épouse J.E Mellian qu’en 1861.
C’est à cette époque qu’Adolphe Just rentre au Petit Séminaire de St Louis à Blois sur recommandation parait-il du curé de sa paroisse. (A lire la description faite par Balzac dans son roman ‘louis Lambert’’ sur les conditions de vie dans les collèges au début du siècle).
A Blois, au milieu du XIXe siècle, les enfants dont les parents souhaitaient une éducation chrétienne, commençaient leurs études au Petit Séminaire Saint-Louis sous la direction de l’Abbé Le Chevalier. Mais les classes n’allaient pas au-delà de la sixième.
Parallèlement, le Petit Séminaire Saint-François de Sales, sis à l’ancien couvent des Minimes, accueillait des élèves dans le but de former de futurs ecclésiastiques et des élèves demeurant laïcs, établissement placé sous la responsabilité du Chanoine Paul Millet (mort en 1900).
Les religieux ont retrouvé la liberté d’enseigner grâce à la loi Falloux de 1850. Just intègre le collège en 1858, il a 10 ans et il y restera 6 ans. Il y obtient rapidement des prix de sortie :
Le 4 aout 1859, il reçoit le prix d’Accessit. Il est élève de 7ème.
il reçoit en autre le 1er prix d’Histoire en 1861 et enfin le 2nd prix de discours latin pour sa dernière classe de rhétorique en 1865 qui lui permet ainsi de tenir des discours en Latin !!!!
Ou ensuite poursuit-il ses études ? A Blois, à Paris où vit son père ?
Car Alexandre Frédéric en janvier 1861, envoie une procuration établie depuis Paris par un notaire de parisien, Me Foucher, autorisant le mariage de sa fille Sophie Pélagie avec Jean Etienne Mellian fils d’Etienne Meslian (d) de Manteaux et de Marie Françoise Lasneau. Cette procuration est enregistrée dans le 5ème.
Pierre Eugène Ledru (49ans), le frère de Frédéric, oncle de la mariée est présent à ce mariage (il signe Le Dru) ainsi que son beau frère Jean Etienne Chéreau, époux de Hélène Rose (Rosalie) Ledru.
Sophie Pélagie Ledru Mellian est supposée recueillir son père à Monteaux lorsque celui revint dans le Loir et Cher. Mais aucune trace officielle.
Alexandre Fréderic mourra en 1874.
Lors du recensement de 1862, Louise n’est pas recensée. Just est toujours au petit séminaire. Ou vit sa mère durant ses années ?
La mère de Just est à nouveau recensée à Mesland lors du recensement de 1871 ; mais rien au sujet de son mari ni de Just qui a 23 ans. A-t-il été incorporé lors de la Guerre de 1870 ? Il ne semble pas car on ne retrouve son nom sur aucun documents d’incorporation en 1868 (ni en 1867 et 1870). A-t-il été réformé et pour quelles raisons ?
Est-il déjà au service de la famille de la Ville de Baugé ?
En juillet 1870, Napoléon III entreprend contre la Prusse une guerre mal préparée, qui le conduit rapidement à la défaite. Le 4 septembre 1870, à la suite d’une journée d’émeute parisienne, l’Empire est renversé.
Les années qui viennent sont des années noires pour les habitants de France. En réaction à la défaite et à la capitulation de Paris, une partie des Parisiens se soulèvent. La Commune de Paris trouve sa source dans un élan républicain se référant à la Première République et au gouvernement révolutionnaire de la Commune de 1792, ainsi qu’à l’insurrection populaire de juin 1848, sous la Deuxième République, qui a été réprimée comme nous l’avons vu de façon sanglante par le gouvernement issu de la Révolution de février 1848.
La Commune de Paris sévira pendant plus de deux mois, du 18 mars 1871 à la « Semaine sanglante » du 21 au 28 mai 1871. Cette insurrection contre le gouvernement, issu de l’Assemblée nationale, qui venait d’être élue au suffrage universel, ébaucha pour Paris une organisation proche de l’autogestion.
À Paris, la mixité sociale dans les quartiers, de règle depuis le Moyen Âge, a presque disparu avec les transformations urbanistiques du Second Empire. Les quartiers de l’ouest (7e, 8e, 16e et 17e arrondissements) concentrent les plus riches des Parisiens avec leur domesticité. Les quartiers centraux (1,2,3,4,5,6,et 14) conservent encore des personnes aisées. Mais les classes populaires se sont installées à l’est (10e, 11e, 12e, 13e, 18e, 19e et 20e arrondissements).
« La Commune était l’expression, chez ses meneurs, d’un républicanisme ultra rouge, antireligieux, jacobin, prolétarien, fouetté par la haine pour cette assemblée monarchiste. »
L’insurgé-type de 1871 est un travailleur parisien, un homme d’une trentaine d’années. Parmi ces insurgés, on rencontre principalement les ouvriers du bâtiment, les journaliers, et les travailleurs du métal, ouvriers d’ateliers ou de petites fabriques. Ils forment respectivement 17 %, 16 % et 10 % du total. Viennent ensuite les employés (8 %), les cordonniers-savetiers (5 %), les marchands de vin (4 %) et les ouvriers du livre (3 %), fortement politisés. Ainsi, de petits patrons côtoient des salariés. Durand ces années troublées, il a du se passer quelque chose dans la famille qu’il faudra un jour élucider…
Louise est donc au bourg en 1871, puis au Moulin en 1876 non loin des Lardonneries où vivent les Touzard. Elle a 66 ans. Elle reparaît 10 ans plus tard et elle est avec son petit fils âgé de 5 ans, prénommé Charles. Il ne peut que s’agir du frère ainé de Marcel Ledru, notre grand père ; Charles est l’ainé des garçons de Just, mort à 20 ans. Elle partage sa maison avec une certaine Marie Vivier !! âgée aussi de 77 ans.
On la retrouve lors du recensement de 1891 où elle est encore recensée comme rentière, ce qui peut laisser penser que soit elle a eu un héritage de ses parents qui étaient vignerons soit elle reçoit une rente de son fils Just ce qui est aussi probable. Elle meurt en 1893 après avoir survécu à l’hiver très froid de 1889/1890.
Au cimetière de Mesland il n’y a aucune tombe au nom de Ledru. Seule la tombe des Touzard est presque à l’abandon.
Jean Touzard mort le 8 mai 1903, membre de la Société st Vincent, est le fils de Jean Georges Touzard , le frère ainé de Louise, et de Rose Rigoreau, son épouse. Il est donc le cousin germain de Just. Qu’était-ce la société St Vincent en ces temps-là ?
Jean Touzard, né le 22//1828 avait épousé Adélaïde Bobin (1835/1908) C’est leur fils Jean Sylvain (11/4/1858) qui épousa le 28/8/1884 Euphrasie Héloïse Mellian (née le 15/1/1865 à Monteaux) la fille de Pélagie Ledru Mellian et nièce de Just. Jean Sylvain est désigné comme propriétaire. Ce ménage eut une fille Marthe Touzard née le 9/9/1886 à Mesland qui est restée célibataire.
J’ai remarqué que l instituteur n’apparaît dans aucun recensement. L’enseignement n’est devenu gratuit et obligatoire qu’en 1882. Les familles nobles ont leurs propres précepteurs. On le constate lors des recensements. Pendant ce temps la plupart des jeunes restent illettrés surtout ceux issus de familles rurales, trop occupés aux travaux des champs et de la ferme.
Ce n’est qu’en 1893 lors du décès de Louise Touzard que l’instituteur est mentionné comme témoin et il est présent au décès en tant qu’ami d’Etienne Mellian le mari de Sophie Pélagie et gendre de Louise.
Le curé n’est mentionné que deux fois lors des recensements.
Voila, j’ai posé les personnages, à vous de les faire revivre si vous en avez le talent, à la manière de Robert Merle ou Ken Follet, ou mieux encore, à votre propre manière.
Dans cette lignée on s’aperçoit que le nom Ledru a été transmis à chaque génération que par un seul individu, limitant ainsi le nombre de descendances au contraire des Ledru du Pas de Calais où les fratries ont été beaucoup plus nombreuses. Il serait intéressant de remonter plus haut dans le temps pour connaître les raisons de cette localisation ou s’il a existé au cours des siècles une migration du Nord vers le Sud en raison des guerres, des épidémies etc. La région des rois de France, comme vu plus haut a été au centre de tous les conflits.